lundi 30 mai 2011

vitraux au kraton Mangkunegaran de Solo

A Solo (Java Centre) -nommée aussi Surakarta-, comme à Yogyakarta, deux lignées royales se partageaient le pouvoir depuis le milieu du XVIIIè siècle. Deux kraton (palais) furent donc construits. Dissensions favorisées par les hollandais en vertu du principe bien connu “diviser pour mieux régner”.
Le Kraton Surakarta, et le Kraton Mangkunegaran. Ce dernier est le plus intéressant.
Dans une pièce reservée aux repas, les fenêtres sont décorées de magnifiques vitraux datés de 1941, figurant des scènes cérémonielles sur fond de décor d’enroulements végétaux stylisés. inspirés des lotus (tels qu'on peut en voir sur des temples hindo-bouddhiques javanais, notamment à candi (temple) Kalasan, près de Yogyakarta).

Sur deux des vitraux l’ensemble instrumental du gamelan est figuré, avec ses métallophones et xylophone, accompagnés de la cithare, la flûte, du rebab et du tambour.

Sur les trois vitraux les personnages, tels des caractères du wayang kulit (théâtre d’ombres javanais joué avec des marionnettes découpées dans du cuir ajouré), sont vus de face, mais avec le visage de profil.

Sur l'un des vitraux, des hommes vêtus de sarong de batik et de blangkon (mouchoirs de tête) sont assis autour des accessoires d’un kenduri (= repas cérémoniel pour commémorer un évènement ou demander “grâce”): 
- dupa (encensoir) au centre, en forme de temple hindouiste, 
- tumpang (cônes de riz en forme de montagne), 
- plats chargés de mets.
Au bas est noté le chiffre du Mangkunegaran de Solo commanditaire: MN VII


Sur un autre, on peut voir les instruments traditionnels du gamelan (de droite à gauche): 
- bonang (instrument du gamelan ayant la forme d’un petit sommier supportant une série de gongs renflés en forme de bulbe))
- kendhang (tambour allongé à deux membranes)
- kenong (gongs renflés en forme de bulbe, disposés individuellement sur un socle), 
- ketuk ou kempyang (petit gong horizontal bulbé), 
- gong ageng (grand gong circulaire suspendu à un portique), 
- saron (série de plaques de bronze posées sur une caisse), 
- gender (métallophone à lames minces surmontant des résonateurs en bambou) 
- bonang.


Sur le troisième de nouveau la représentation d’un ensemble instrumental de gamelan (de droite à gauche):
- rebab (vièle à pique à deux cordes), 
- siter (cithare)
- suling (flûte droite), 
- ?? (instrument indéterminé)
- pesinden (chanteuse soliste dans le gamelan javanais) 
gambang (xylophone comportant des touches en bois alignées sur une caisse de résonance), 
- 2 gender (type de métallophone à lames minces suspendues sur tubes de bambous résonnateurs accordés)
- kendhang (tambour).



Le gamelan est un ensemble de métallophones (de bronze) et xylophones (bambou, bois) frappés avec maillets et marteaux, constituant un tout indissociable. Catherine Basset, dans son passionnant petit ouvrage "Musiques de Bali à Java, l'ordre et la fête" (éditions Cité de la Musique/Actes Sud), emploie le terme de “clavier éclaté” pour le définir, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un seul instrument conçu comme un tout et accordé comme un instrument unique par un forgeron spécialiste (pande), mais joué par plusieurs “musiciens”.

On fait remonter son origine aux tambours de bronze de la culture de Dông So’n (environ 500 av JC au début de notre ère) qui aurait diffusé à partir du nord Viêt-Nam dans toute l’Asie du Sud-Est.
Est attribué au bronze, et à sa résonnance, une puissance magique entre relation avec les rites de fertilité et l’ordre du monde. D’où les circonstances solennelles dans lesquelles le gamelan est joué, et sa présence dans tous les kraton à Java, Sunda et Bali. Il ne fait aucun doute que les représentations figurant sur ces vitraux s'inscrivent dans ce contexte rituel et doivent se lire comme tel. Tant leur facture (composition pyramidale, enroulement de feuilles de lotus, personnages de profil comme dans le wayang) que les thèmes figurés (repas cérémoniel, gamelan) en témoignent.

Lors de l'exposition coloniale de 1889 des "concerts" de gamelan ont été joués devant le public parisien. Tant la composition musicale suivant un rythme cyclique et les sonorités métalliques ont été une découverte et une source d'inspiration pour quelques musiciens,  en premier lieu Debussy.

le gamelan sous le pendopo (partie avancée et ouverte d'une résidence,
servant aux réceptions) du kraton du Pakualaman, à Yogyakarta
autre vue du même gamelan
dans l'arrière pays de Yogyakarta, quelques habitants d'exercent...
...devant des panneaux de notation de la musique

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